[BG] Styx - Assassin au service de Mitra

(Voilà mon BG en deux parties dont voici la première.)

Cette ville bruyante aux fortes senteurs d’épices s’appelait Khemi. On y avait envoyé un convoi Aquilonien chargé de convertir les populations primitives de Stygie au culte de Mitra.

Le prêtre Valarius se tenait debout devant une assemblée plus attentive au mouvement de sa robe de soie blanche brodée de fil d’or qu’à ses paroles bienveillantes. La richesse et la puissance aquilonienne étaient connues partout en Hyborée et chacun espérait y accéder en suivant les préceptes du prêtre.

« - Priez Mitra pour votre salut ! Vos dieux primitifs ne vous seront d’aucune aide face aux ténèbres grandissantes ! Il existe une alternative à la misère, et celle-ci se trouve dans la main de chaque enfant converti au culte de Mitra ! »

Haragos, un des jeunes missionnaires accompagnant l’impressionnante caravane aquilonienne observait la scène attentivement, buvant les paroles du vieil homme courbé. La puissance que mettait Valarius dans son discours alors que l’age le forçait à appuyer tout son poids sur un bâton orné de gemmes et de pierres précieuses le fascinait. Il avait suivi le prêtre dans toutes ses campagnes. Le vieil homme l’avait pris sous son aile alors que la faim et la misère l’avaient conduit aux portes de Tarantia. Haragos avait supplié Mitra de lui donner un avenir, il le trouva dans le culte et dans les paroles de Valarius.

Soudain, la foule s’écarta pour laisser avancer un homme masqué. Il traversa l’assistance comme on franchit un marécage, chaque personne se retirant de son passage comme les algues repoussées par le mouvement de l’eau.

« - Tes paroles sont du poison pour notre peuple. Set a entendu tes hurlements ridicules et souhaite t’offrir la mort que tu mérites. »

L’homme était à présent à quelques mètres à peine de Valarius. Lorsqu’il leva son bras, la dague qu’il tenait fermement dans sa main apparut. Vestige d’anciens sacrifices, elle était émoussée par endroits et la rouille cachait la splendeur qui caractérise les armes stygiennes. Une substance noire enduisait la lame de l’arme à quadruples tranchants.
Il bondit brusquement à la gorge du prêtre comme le félin à dents de sabre sur sa proie.

Haragos était méfiant et s’était rapproché de son mentor en entendant les paroles de l’assassin, suffisamment pour plonger rapidement entre Valarius et son prédateur. La lame pénétrant la chair du jeune homme provoqua un son aigu et bref, le même qui caractérise un coup mortel porté à l’abdomen. L’assassin tenait Haragos contre son flanc, le maintenant par la nuque. Lorsqu’il lâcha son emprise, le jeune apprenti s’effondra sur le sable, marquant la terre de son sang qui coulait abondamment. La garde personnelle du prêtre avait réagi trop tard, alourdie par l’armure, affaiblie par le soleil et l’assassin s’écroula enfin, abattu par un carreau tiré à la tête.

Valarius n’avait dit mot depuis le départ de la caravane. Il restait assis dans sa diligence blanche ornée de dorures à écouter le couinement agaçant des roues à chaque mètre parcouru. La mort du jeune Haragos l’avait bouleversé. Khemi n’était qu’à quelques kilomètres derrière eux et la caravane avançait lentement, longeant le grand fleuve. Il songeait.

« - Mitra, donne moi la force de dépasser cette épreuve. Haragos était bon et c’est moi que tu as choisi d’épargner en prenant sa vie. Il était un serviteur vigoureux contrairement à moi, et malgré cela, tu as pris sa vie au lieu de la mienne. Qu’attends tu encore de moi qui suis vieux et fatigué ? »

Le couinement s’arrêta alors que la diligence stoppait.

« - Pourquoi nous arrêtons nous ? Que se passe-t-il ? »

Il écarta le rideau de lin qui le protégeait du soleil et aperçu un de ses hommes agenouillé au bord de la rivière. Il semblait ramasser quelque chose dans l’eau. Inquiété par cet arrêt soudain il n’osait bouger de son siège. Le garde tenait un panier dans ses bras et était penché sur son contenu comme si il avait découvert un trésor achéronien.

« - Incroyable ! »

Le prêtre de plus en plus intrigué passa sa tête par la fenêtre et interpella son garde du corps.

« - Qu’est-ce donc ? Donnez le moi ! »

Le garde hésitant s’approcha de la diligence avec le panier. Il le tendit au vieil homme par la fenêtre. Il eut un étrange sourire. Un nourrisson dormait paisiblement, enveloppé dans un drap de soie.

« - Sa peau est claire et ses yeux sont gris. Que fait un nouveau-né aquilonien en Stygie ?» Demanda le garde.
« - Je n’en ai aucune idée, mais je comprends le signe que Mitra m’a envoyé.» Répondit-il en regardant le soleil se cacher derrière l’horizon bordé d’une lueur rougeoyante.

Le convoi avait repris sa route et le prêtre tenait le panier sur ses genoux, fixant le nourrisson comme si il tentait de l’évaluer. Il s’adressa à l’enfant.

« - Je ne sais si c’est un hasard, mais je prend ta venue comme une réponse de Mitra à mes prières. Trop longtemps j’ai voyagé à travers le monde pour prêcher les doctrines du culte, trop longtemps j’ai brûlé sous un soleil de plomb à la recherche de nouveaux fidèles. Je n’aurai bientôt plus la force de tenir sur mes jambes et je ne suis plus capable de me défendre dans un monde où règnent violence et perversion. Mes méthodes sont dépassées et la guerre des religions ne fait que commencer. »

Il caressa la joue du poupon. En enfonçant fermement son ongle de pouce dans l’épaule de l’enfant, le prêtre marqua sa peau en laissant une cicatrice en forme de croissant de lune. Il essuya le sang versé et dit.

« Tu seras la main vengeresse de Mitra. Tu extirperas le pêcher des entrailles des hérétiques et tu convertiras les infidèles. Tu recevras une éducation dans la pure tradition aquilonienne et nous viendrons te chercher en temps voulu. Tu as été trouvé dérivant au fil du Styx, c’est ainsi que tu te nommeras… Styx. »